Centre de Référence des Streptocoques du groupe B
 

Le Streptocoque du groupe B, première cause d'infections néonatales graves. Epidémiologie et stratégies de prévention.

P. MELIN(1) , M. SCHMITZ(1) , P. DE MOL(1) , JM. FOIDART(2) et J. RIGO(3)
 
RESUME
INTRODUCTION
MICROBIOLOGIE
EPIDEMIOLOGIE ET TRANSMISSION
MANIFESTATIONS CLINIQUES
FACTEURS DE RISQUE ASSOCIES A L'INFECTION NEONATALE PRECOCE
STRATEGIES DE PREVENTION
DEPISTAGE PRENATAL OU A L'ACCOUCHEMENT
DISCUSSION DES STRATEGIES DE PREVENTION
BIBLIOGRAPHIE
 

Page d'acceuil
(1) : Service de Microbiologie Médicale, Université de Liège.
(2) : Service de Gynécologie Obstétrique, Université de Liège.
(3) : Service de Néonatalogie, Université de Liège.
RESUME
Dès le début  des années 70, le streptocoque du groupe B (SGB)  émergea comme pathogène majeur pour les nouveau-nés.  Depuis, dans la plupart des pays industrialisés, le SGB représente la première cause d'infection  néonatale sévère.   La plupart de ces infections, associées à une morbidité et mortalité importantes, pourraient être prévenues par l'administration intrapartum d'une antibioprophylaxie aux mères d'enfant à risque de développer une infection précoce. Diverses sociétés professionnelles américaines et le CDC (Centers for Disease Control and Prevention) ont publié des recommandations stratégiques pour leur prévention.  Aujourd'hui, en Belgique,  il n'existe pas encore de directives concernant la prévention de ces infections.
SUMMARY
As soon as the beginning 70's, group B streptococci (GBS) became clearly predominant in neonatal infections.  There was a dramatic increase in the incidence of GBS neonatal sepsis and meningitis throughout developed countries and GBS emerged as the leading cause of severe neonatal infections.  Most of these infections, associated with high mortality and morbidity, could be prevented  by intrapartum chemoprophylaxis given to risk mothers.   AAP, ACOG and the CDC issued guidelines for their prevention.  Today, in Belgium,  there is still no recommendations for the prevention of GBS early-onset infections.
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INTRODUCTION

Les premiers cas d’infection néonatale à streptocoques du groupe B (SGB) ont été décrits par Eickhoff et al. en 1964 (1). Et depuis son émergence en pathologie infectieuse néonatale dans les années 70, le SGB est devenu la première cause d’infection bactérienne sévère du nouveau-né (2-4). Cette augmentation de l’incidence des septicémies et méningites néonatales à SGB a été observée dans tous les pays industrialisés. Ces infections sont le plus souvent transmises verticalement. Malgré les progrès thérapeutiques, ces infections néonatales restent associées à une morbidité et une mortalité importantes. En Belgique, 150 à 300 nouveau-nés présentent chaque année une infection grave à SGB et plus de 10 % en meurent. Depuis 1983, ces infections représentent 36 % des septicémies et méningites néonatales (0-28 jours) déclarées par un réseau de laboratoires vigies belges (5). Comparativement E. coli, S. epidermidis et S. aureus sont respectivement responsables de 18, 11 et 10 % des septicémies et méningites néonatales (5). La plupart de ces infections à SGB pourraient être prévenues par l’administration intrapartum (c’est-à-dire pendant l’accouchement dès le début du travail si possible) d’une antibioprophylaxie aux mères d’enfant à risque de développer une infection précoce. Une large étude prospective de surveillance épidémiologique et des moyens logistiques disponibles en Communauté Française vient de commencer et se poursuivra pendant l’année 1999. Au terme de cette étude et en consensus entre les gynécologues-obstétriciens, les microbiologistes et les pédiatres nous espérons être en mesure de proposer des recommandations de prévention appropriées à notre pays.
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MICROBIOLOGIE

Streptococcus agalactiae est l’espèce désignant les streptocoques ß-hémolytiques appartenant au groupe B de Lancefield (6). Les streptocoques du groupe B sont des cocci à Gram positif, en chaînettes, aérobies facultatifs à croissance aisée sur les milieux de culture habituels. Ils produisent une capsule polysaccharidique (7). La variété antigénique des polysaccharides capsulaires constitue la base d’un système de sérotypage. On connaît actuellement au moins sept sérotypes Ia, Ib, II, III, IV, V et VI (8, 9). Les anticorps dirigés contre ces antigènes de types paraissent protecteurs (10, 11). En Belgique comme en Amérique du Nord, presque toutes les souches restent sensibles à la pénicilline G, traitement de choix des infections invasives. Moins de 5 % des souches sont résistantes à l’érythromycine et à la clindamycine.
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EPIDEMIOLOGIE ET TRANSMISSION                                                                   retour au sommaire


Colonisation asymptomatique
Les SGB sont des commensaux occasionnels du tractus gastro-intestinal et des voies génitales de la femme. Les taux de colonisation peuvent varier selon les groupes ethniques, les localisations géographiques et l’âge (12, 13). Actuellement, la prévalence de colonisation vaginale et rectale de la femme enceinte varie de 10 à 15 % en Europe du Nord et de 20 à 30 % en Amérique du Nord (14, 15). Ces variations dans les prévalences publiées sont en partie attribuables à des différences méthodologiques de culture (16) mais sont surtout associées aux caractères des populations étudiées. Cette colonisation est dynamique : elle peut être transitoire, intermittente ou continue (13, 15, 17). La colonisation est en général asymptomatique. Seuls des examens bactériologiques peuvent reconnaître les porteurs de SGB.

Transmission aux nouveau-nés
Environ la moitié des enfants nés d’une mère colonisée vont acquérir ce SGB dans la période périnatale. Le nouveau-né peut devenir colonisé ou infecté par quatre voies différentes (18-20). La voie la plus importante est la colonisation directe in utero par voie ascendante, le plus souvent après rupture de la poche des eaux . Mais le nouveau-né peut aussi acquérir le SGB par contact ou inhalation lors du passage dans la filière génitale ou encore par voie sanguine. Le dernier mode d’acquisition est la transmission horizontale, après la naissance, par contact avec une personne colonisée ou transitoirement contaminée si les conditions d’hygiène sont mauvaises (lavage des mains insuffisant) (21, 22).

Incidence de l’infection néonatale précoce et séro-épidémiologie
Alors que la majorité des bébés colonisés restent asymptomatiques, 1 à 4 % développent une infection cliniquement apparente et démontrée par une hémoculture ou culture de liquide céphalo-rachidien (LCR) positives à SGB, soit 1 à 3 cas d’infection précoce pour 1000 naissances en vie (23, 24). En plus de ces cas, 1 à 4 autres% développent une infection cliniquement apparente mais non confirmée par une hémoculture ou culture de LCR positive à SGB, mais fortement suggérée par un antigène urinaire SGB positif et des cultures cutanéo-muqueuses SGB-positives. Tous les sérotypes sont rencontrés avec une prédominance du sérotype III, suivi en Belgique par les sérotypes Ia et II. La figure 1 présente la distribution des sérotypes de 56 souches isolées lors d’infection précoce en Belgique entre 1995 et 1997 (25).
 

figure 1: Distribution des sérotypes de SGB responsables d'infection néonatale (56 souches isolées de sang ou de LCR, de 1995 à 1997 en Belgique).
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MANIFESTATIONS CLINIQUES                                                                                           retour au sommaire


Infections chez le nouveau-né
Chez le nouveau-né, l’infection à SGB présente deux formes cliniques différentes (tableau I).
L'infection précoce ("early onset GBS disease") se déclare pendant les cinq premiers jours de vie, presque immédiatement à la naissance avec une moyenne d’âge de 1 à 10 heures de vie (26). Elle se produit typiquement après la colonisation de l’utérus et/ou du placenta suite à l’ascension du SGB vaginal (1, 18, 27). Elle est caractérisée par le développement rapide d’une détresse respiratoire sévère, d’une septicémie avec état de choc, d’une coagulation intravasculaire disséminée et d’une défaillance des organes vitaux. Ce tableau clinique est éventuellement accompagné d’une méningite. En dépit d’une antibiothérapie adéquate, la mortalité est encore de 5 à 20 % (24, 28, 29) et plus de 30 % des enfants atteints de méningite gardent des séquelles neurologiques importantes (cécité, surdité, retard mental).
L’infection tardive ("late onset GBS disease") se produit dans les premiers mois de vie au-delà de la première semaine avec une moyenne d’âge d’un mois, et avec une incidence de 0,5 à 1 cas pour 1000 nouveau-nés (30). Elle résulte en général d’une transmission horizontale et affecte le plus souvent des enfants en bonne santé. Contrairement au sepsis rencontré dans l’infection précoce, l’infection tardive est caractérisée par de la fièvre, une bactériémie et le plus souvent une méningite. L’arthrite septique, l’ostéomyélite et la cellulite sont d’autres manifestations de cette forme. Le sérotype III est isolé dans plus de 90 % des cas. La mortalité est moins élevée que dans l’infection précoce, mais les séquelles sont beaucoup plus importantes, en raison de la fréquence des méningites.

Tableau 1 : Caractéristiques des infections néonatales à SGB
 
INFECTION PRECOCE 
INFECTION TARDIVE
Incidence
0,5 à 4 pour 1000
0,5 à 1 pour 1000
Début
< à 5 jours
(moyenne: 1 -10 heures )
> à 5 jours
( moyenne:1 mois)
Acquisition
Transmission verticale
Intrapartum
Transmission horizontale
A l'accouchement ?
Nosocomiale ?
Dans la communauté ?
Caractéristiques cliniques
Détresse respiratoire 
avec pneumonie
Sepsis
(Méningite : 5-15%)
Fièvre
Bactériémie
Méningite
(Ostéomyélite)
Mortalité
5 à 20 %
10%
Sérotypes
Tous
(surtout III, Ia et II)
Le III principalement

Infections chez la femme enceinte
Chez la femme enceinte, le SGB peut donner une infection urinaire, une pyélonéphrite, une chorio-amniotite, une endométrite ou une infection de plaie et est responsable de 15 à 25 % des états fébriles du post partum (31, 32). La relation entre la colonisation vaginale par SGB et un travail ou une rupture de poche prématurés est complexe et difficile à évaluer.

Infections chez l’adulte
Les infections invasives à SGB rencontrées chez l’adulte sont le plus souvent des infections de la peau et des tissus mous, des bactériémies sans foyer connu, des bactériémies à point de départ urinaire, des endocardites, des pneumonies et des méningites. Le taux de mortalité est élevé et varie de 20 à plus de 50 % (30, 33).

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FACTEURS DE RISQUE ASSOCIES A L'INFECTION NEONATALE PRECOCE


Etant donné la voie de transmission, le principal facteur de risque est la colonisation vaginale maternelle au moment de l’accouchement. Le taux d’infection augmente aussi avec le degré de colonisation : 85 % des enfants développant une infection précoce sont nés de mères très colonisées (17, 19, 34).
D’autres facteurs de risque comprennent la notion d’antécédent d’infection à SGB lors d’une naissance antérieure (28) et une bactériurie à SGB pendant la grossesse en cours, reflétant probablement une faible réponse immunitaire maternelle anti-SGB. La prématurité (moins de 37 semaines) augmente aussi la vulnérabilité des nouveau-nés à l’infection à SGB. Le facteur spécifique contribuant est le taux peu élevé d’anticorps (IgG) dirigés contre les antigènes capsulaires de type, en relation avec un faible transfert transplacentaire des IgG maternelles à ce stade de la grossesse (30, 35). La rupture prolongée de la poche des eaux (>  à 18 h) (36, 37) et la fièvre (>  à 38°C) au cours du travail sont également associées au risque d’infection précoce (3, 4, 24, 26).
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STRATEGIES DE PREVENTION                                                                               retour au sommaire


Pendant ces 20 dernières années, plusieurs stratégies de prévention ont été étudiées. Deux approches théoriques ont été envisagées: la vaccination et la chimioprophylaxie.

La vaccination
La vaccination des jeunes filles ou des femmes enceintes pendant le premier trimestre de la grossesse préviendrait au plus 85 % des infections néonatales précoces et tardives. Cette approche rencontre deux principaux obstacles (38-41). D’une part, les anticorps maternels ne traversent pas le placenta avant 32 semaines de gestation : les grands prématurés, particulièrement sensibles à cette infection, ne seraient donc pas protégés par cette stratégie. D’autre part, différentes préparations vaccinales à base d’antigènes capsulaires polysaccharidiques (peu immunogènes) des principaux sérotypes (Ia, Ib, II, III et V) sont toujours en développement et en cours d’évaluation (42, 43).

La chimioprophylaxie
Une des premières stratégies était d’identifier les mères colonisées et de les traiter pendant la grossesse. Mais ce fut un échec car les femmes se recolonisent régulièrement tout au long de la grossesse, soit à partir de leur tractus gastro-intestinal, soit par leurs rapports sexuels (12, 14, 44, 45).
Le traitement de tous les enfants juste après la naissance fut également un échec. En effet, l’infection débute in utero, et peut déjà être bien installée lorsque le traitement postnatal est instauré (37).
Actuellement, la seule stratégie démontrée efficace est d’identifier les foetus à risque de développer une infection à SGB précoce et d’administrer à leurs mères une antibioprophylaxie intrapartum (46-50). Cette stratégie est la base des recommandations de l’ACOG (American College of Obstetricians and Gynecologists), de l’AAP (American Academy of Pediatrics) et du CDC (Centers for Diseases Control and Prevention). En 1992, l’ACOG et l’AAC ont publié des recommandations assez différentes pour l’identification et le traitement des mères des enfants à risque de développer une infection précoce (51, 52). L’ACOG recommandait de ne pas faire de dépistage prénatal de colonisation et de traiter toutes les mères présentant des facteurs de risque d’infection néonatale. Par contre, l’approche de l’AAP suggérait un dépistage recto-vaginal de colonisation à SGB à la fin du deuxième trimestre de grossesse. Si les mères étaient identifiées comme colonisées et avaient au moins un autre facteur de risque, l’AAP recommandait une administration intrapartum d’antibiotique.
L’efficacité de ces stratégies a été évaluée (53, 54) et leurs discordances d’attitude ont conduit à une certaine confusion. En 1996, le CDC publiait des recommandations reflétant un compromis raisonnable entre ces deux types de stratégies (55).

Recommandations du CDC(43)                                                                                       retour au sommaire

- Les obstétriciens, en collaboration avec les laboratoires et les maternités, doivent adopter une stratégie de prévention de l’infection néonatale précoce à SGB.
- Quelle que soit la stratégie suivie,

1) les femmes enceintes présentant une bactériurie à SGB, symptomatique ou non, doivent être traitées au moment du diagnostic et recevoir une antibioprophylaxie intrapartum;
2) toutes les femmes ayant déjà eu un nouveau-né infecté par un SGB et
3) toutes les femmes accouchant avant 37 semaines de gestation devraient aussi recevoir une antibioprophylaxie intrapartum. Pour ces patientes, les cultures de dépistage sont superflues.
Ensuite, une des deux alternatives suivantes est proposée.

Approche basée sur le dépistage (premier choix) (fig. 2). Un dépistage ano-vaginal est réalisé chez toutes les femmes entre les 35-37èmes semaines. Si la culture est positive, on administre des antibiotiques pendant le travail. Si le statut de colonisation est inconnu, une antibioprophylaxie intrapartum s’impose en présence d’un état fébrile (>  à 38°C) ou d’une rupture de la poche des eaux de plus de 18 heures.

Approche basée sur les facteurs de risque (alternative acceptable) (fig. 3). En plus des trois situations décrites précédemment, une antibioprophylaxie est aussi indiquée chez toutes les parturientes qui présentent au moins un des facteurs de risque suivants : rupture de la poche des eaux de plus de 18 heures ou température >  à 38°C.

Fig 2 :     Algorithme pour la prévention des infections néonatales précoces à SGB
              Approche basée sur un dépistage à 35-37 semaines de gestation

Figure 3 :    Algorithme pour la prévention des infections néonatales précoces à SGB
                  Approche basée sur les facteurs de risque

- Les propositions d’antibioprophylaxie intrapartum (tableau II) sont les suivantes: soit la pénicilline G en iv, 5 millions U initialement en début de travail et puis 2,5 millions U toutes les 4 heures jusqu’à l’accouchement, soit l’ampicilline iv (2 g initialement suivis de 1 g toutes les 4 heures). La préférence est donnée à la pénicilline pour son spectre d’activité plus étroit et à moindre risque de sélectionner des résistances.
Pour les patientes allergiques à la pénicilline, la clindamycine (900 mg iv toutes les 8 heures) ou l’érythromycine (500 mg en iv toutes les 6 heures) peuvent être utilisées. Les femmes recevant déjà des antibiotiques actifs sur le SGB pour le traitement d’une chorio-amniotite par exemple, ne doivent plus recevoir un traitement complémentaire par la pénicilline.

 
Tableau 2 : Traitements recommandés pour l'antibioprophylaxie intrapartum
 
Recommandé Pénicilline G, 5 mU en IV initialement et puis 2,5 mU en IV toutes les 4 heures jusqu'à l'accouchement
Alternative  Ampicilline, 2 g en IV initialement, et puis 1 g en IV toutes les 4 heures jusqu'à l'accouchement 
Si allergie à la pénicilline 
Recommandé Clindamycine, 900 mg en IV toutes les 8 heures jusqu'à l'accouchement 
Alternative  Erythromycine, 500 mg en IV toutes les 6 heures jusqu'à l'accouchement
- Prise en charge et évaluation des enfants nés de mères ayant reçu une antibioprophylaxie (fig. 4). En présence de signes d’infection, une antibiothérapie empirique (ampicilline + gentamicine initialement, et puis pénicilline) est entreprise après un bilan infectieux (formule hémoleucocytaire complète, hémoculture et si nécessaire, une radiographie pulmonaire ou une ponction lombaire en fonction des signes cliniques). En absence de signes d’infection, si l’enfant est prématuré (< 35 semaines) ou si l’antibioprophylaxie a été administrée depuis moins de 4 heures, les enfants sont observés plus étroitement pendant 48 heures. Seul un bilan infectieux limité est recommandé (formule hémoleucocytaire et hémoculture). En cas de suspicion de sepsis un traitement empirique est commencé. Et finalement, en l’absence de signes infectieux et si l’antibioprophylaxie a été administrée depuis plus de 4 heures, les enfants sont observés plus attentivement pendant 48 heures mais aucun bilan infectieux ni traitement antibiotique ne sont recommandés.
En Belgique, l’amikacin remplace régulièrement la gentamicine dans le traitement empirique et la CRP est systématiquement réalisée dans tout bilan infectieux de néonatalogie.

Figure 4 : Algorithme pour la prise en charge et l'évaluation des enfants nés de mères ayant reçu une antibioprophylaxie  pendant le travail (API)

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DEPISTAGE PRENATAL OU A L'ACCOUCHEMENT                                                        retour au sommaire


Un élément clé dans ces stratégies de prévention est l’identification des parturientes colonisées, pour la sélection des candidates à l’antibioprophylaxie. Demandant un minimum de 15 à 18 heures pour leur lecture, les cultures vaginales, réalisées en début de travail ne peuvent donc pas être utilisées dans ce but. Le statut de colonisation vaginale peut fluctuer tout au long de la grossesse. Pour cette raison, les valeurs prédictives d’un dépistage prénatal sur la colonisation au moment de l’accouchement varient inversement avec le temps écoulé entre le dépistage et l’accouchement. Trois à quatre semaines avant l’accouchement, les valeurs prédictives positive et négative du dépistage sont respectivement de 88 et 96 % (56), alors que la valeur prédictive positive est de 43 % seulement pour les dépistages réalisés plus de 6 semaines avant l’accouchement.

Pour optimaliser le dépistage prénatal à réaliser entre 35 et 37 semaines :
- un prélèvement vaginal (tiers distal) et un prélèvement anorectal doivent être effectués et transportés dans un milieu de conservation (Amies, par ex.).
- la prescription d’analyse doit spécifier qu’il s’agit d’un dépistage de SGB prénatal.
- en plus d’un milieu de culture habituel, un bouillon d’enrichissement sélectif (type Todd-Hewitt + colistine / ac. nalidixique ou + gentamicine / ac. nalixique) doit être inoculé au laboratoire. Après 18-24 h d’incubation à 35°C, le bouillon est sous cultivé sur une gélose au sang. Avant de répondre une recherche de SGB négative, les milieux solides doivent être incubés 48 h à 35°C en aérobiose + 5-7 % CO2.

L’alternative idéale de ces recommandations est l’utilisation d’un test rapide de détection d’antigène chez les parturientes. Cette mise en évidence extemporanée de la présence de SGB devrait être plus efficace pour identifier les mères colonisées à l’accouchement et candidates à l’antibioprophylaxie. Quelques tests ont été développés (57) mais un seul, le Strep B OIA de Biostar (Boulder, Co, USA), présente des caractéristiques de sensibilité et de spécificité acceptables. Lors d’une évaluation du Strep B OIA réalisée à Liège en 1996-1997 sur des échantillons vaginaux prélevés chez des parturientes dès leur admission à la maternité, ses valeurs prédictives positive et négative par rapport à la culture étaient de 86 % et 99 % respectivement. Ce test a montré une excellente sensibilité (96 %) chez les parturientes faiblement à très colonisées (58). Il est réalisé en 30 minutes, mais il présente cependant quelques contraintes de procédure limitant ainsi son utilisation en routine dans un laboratoire d’urgence.
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DISCUSSION DES STRATEGIES DE PREVENTION                                                   retour au sommaire


Pour mieux comprendre les rapports coût/bénéfice de la prophylaxie en fonction des différentes stratégies, comparons leurs efficacités théoriques (tableau III). Formulons l’hypothèse d’une population de 1000 femmes enceintes, avec soit une prévalence de colonisation vaginale par SGB de 20 % et vaginale + anorectale de 25 % (comme en Amérique du Nord), soit une prévalence de colonisation vaginale par SGB de 12 % et vaginale + anorectale de 16 % (comme en Belgique), une incidence d’infection néonatale précoce confirmée de 2/1000 nouveau-nés (soit environ la moitié des cas réels: cas confirmés + suggérés) et une prévalence d’accouchement avec au moins un facteur de risque associé au développement d’une infection néonatale précoce de 20 %. En prenant en compte les sensibilités, spécificités, valeurs prédictives positives et négatives des différentes techniques de dépistage, nous avons évalué, pour chaque stratégie, le pourcentage maximal de cas prévenus et le nombre de chimioprophylaxies intrapartum à engager pour prévenir au moins un cas d’infection néonatale précoce.

Prenons comme référence la stratégie "universelle" consistant à administrer une antibioprophylaxie à toutes les parturientes. Elle permettrait au mieux de prévenir 85 à 89 % des cas d’infection précoce. Pour prévenir une seule infection, il faudrait traiter 588 mères, ce qui ne serait pas rationnel, sans compter le risque de réactions anaphylactiques et d’émergence de germes résistant aux antibiotiques utilisés. Si la notion de facteurs de risque (ACOG et alternative du CDC) reste intéressante dans les populations où la prévalence du portage vaginal est importante, elle l’est beaucoup moins dans les populations où cette prévalence est moindre comme en Belgique et en Europe du Nord en général. Pour la Belgique, la première proposition du CDC basée sur un dépistage prénatal à 35-37 semaines ou mieux encore une variante basée sur un dépistage rapide de colonisation vaginale réalisé en début de travail, représenteraient des attitudes plus rationnelles.

Tableau 3 :Conséquences et efficacité théoriques de différentes stratégies de prévention des infections néonatales précoces à SGB.
 
  Universelle AAP(1992) ACOG/CDC(II)  CDC(I) CDC variante
IAP  à toutesles femmes si SGB 26-28s.positif etfacteur de risque si facteurde risque si SGB 35-37s.positif  si SGB testrapide enintrapartumpositif
Nb API / 1000 naissances 1000 50 (32)* 200 (200)* >250 (>160)* 230 (158)*
Nb API / cas prévenu  588 79 (51)* 157 (157)* >166 (>107)* 150 (103)*
% Cas prévenus 85 31,5 63 75 76,5

API=  AntibioProphylaxie Intrapartum.
N=  Valeurs calculées pour colonisation vaginale + rectale de 25%, comme en Amérique du Nord.
( N' )*= Valeurs calculées pour colonisation vaginale + rectale de 16%, comme en Belgique probablement.

Pour choisir la stratégie de prévention la plus adaptée à une population, la prévalence de la colonisation des femmes enceintes par SGB, la prévalence des accouchements "à risques" et l’incidence de l’infection néonatale doivent être connues. Dans cette perspective, une large étude prospective de surveillance épidémiologique et des moyens logistiques disponibles en Communauté Française vient de commencer et se poursuivra pendant l’année 1999.
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